Ces deux articles disposent que : « Un décret en Conseil d’Etat fixe, pour les décisions [jugements] de premier ressort, d’appel ou de cassation, les conditions d’application du présent article. »
De fait, 2 ans après, toujours pas de nouvelles des décrets en question, et ils ne semblent même pas dans les tuyaux.
Proposition : faire une demande aux ministres compétents tendant à ce que soient édictés les décrets d’application prévus aux articles 20 et 21 de la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique.
La loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique a modifié l’article L10 du code de justice adminsitrative. L’article prévoit un décret en Conseil d’Etat qui fixe les conditions de mise à la disposition du public à titre gratuit des jugements de premier ressort, d’appel ou de cassation pour l’ordre administratif.
La même loi a modifié l’article L111-13 du code de l’organisation judiciaire. L’article prévoit un décret en Conseil d’Etat qui fixe les conditions de mise à la disposition du public à titre gratuit des jugements de premier ressort, d’appel ou de cassation pour l’ordre judiciaire.
Nous vous prions de bien vouloir procéder à la publication de ces deux décrets.
Intéressant, dans son rapport annuel publié en août 2018, la Cour de cassation invitait à une action contre l’État pour obliger à la publication des décrets loi Lemaire :
« Il importe de publier, sans plus attendre, le décret d’application. A défaut, l’impatience de l’opinion publique serait grande et la responsabilité de l’État pourrait être engagée par les acteurs économiques. Dans le cas où l’article L. 111-13 du code de l’organisation judiciaire serait modifié dans le sens sinon dans les termes de l’article 19 du projet de loi de programmation 2018- 2022 et de réforme pour la justice, un simple ajustement du texte réglementaire pourrait être rapidement publié. »
Update sur ce sujet : on a donc saisi le CE avec le concours de Me Hannotin. La requête a été déposée le 18 avril 2019 et enrôlée sous le numéro 429.956. Sans nouvelles depuis, nous venons enfin de recevoir des updates :
Le Conseil d’Etat nous a communiqué un moyen d’ordre public relevé d’office tiré de ce que le recours ne présente plus d’objet dès lors que, postérieurement à son introduction, le décret du 29 juin 2020 relatif à la mise à disposition du public des décisions des juridictions judiciaires et administratives a été publié et applique les dispositions de la loi
Nous avons répondu que le décret ne permettait pas l’application de la loi vu qu’il renvoie à des arrêtés, mais la jurisprudence sur le sujet est très mauvaise
On a enfin reçu une réponse du MinJus qui fait une page et soutient le moyen d’ordre public
Le rapporteur public Alexandre Lallet a mis en ligne le sens de ses conclusions : sans surprise, non-lieu-à statuer, mais il propose de condamner l’Etat à verser à l’association 3.000 euros au titre des frais d’instance
Donc voilà probable défaite pour adoption du décret, bien que ce dernier soit critiquable et ne permette pas l’adoption de la loi
Le Conseil d’État a d’abord diligenté une mesure d’instruction pour demander au Ministère d’expliquer pourquoi un délai d’adoption des arrêtés n’était pas prévu
Le Conseil d’État a ensuite soulevé un nouveau moyen d’ordre public le 23 décembre (miam) portant sur le fait que la requête pourrait être déclarée irrecevable du fait de l’adoption de la loi de programmation de la justice qui a modifié les articles de la loi Lemaire
Nous venons de déposer le mémoire complémentaire ci joint pour répondre à ces éléments.
Le Conseil d’État a compris notre position, ce n’est pas possible qu’il n’y ait même pas de calendrier 4 ans après la loi Lemaire, et ordonne ainsi la prise des arrêtés prévus dans le décret récemment adopté dans un délai de 3 mois à compter de la notification de la décision + 3000 euros de frais de justice pour l’association !
Je tenais juste à vous dire bravo! J’exerce en tant que défenseur syndical, et l’accès aux jurisprudences est fondamental! Certes, j’ai accès à un éditeur juridique avec BDD de jurisprudences de par mon mandat de représentant du personnel de mon entreprise, mais il n’est pas complet, et surtout, quelle inégalité entre les défenseurs syndicaux dépourvus de tels moyens, et les avocats qui ont des honoraires et peuvent se payer un truc pareil…
Les magistrats ont leurs BDD (Jurica, Ariane, Ariane archives), il suffirait déjà dans un premier temps de rendre l’accès ouvert, ce ne serait pas long.
Après, une fois que l’on a accès aux jurisprudences, ce n’est que la première étape. Il reste encore à identifier la bonne à coup de mots clés, et de lectures, donc les éditeurs juridiques n’ont pas (encore) trop de soucis à se faire : une bonne hiérarchisation/indexation des jurisprudences (parce que bien entendu le ministère de la justice en fera probablement le moins possible, i.e. refourguer tout n’importe comment), faire la distinction entre les jurisprudences rendues sur des textes abrogés, sur des textes encore en vigueur mais qui ne sont plus d’actualité à cause de revirements de jurisprudences, des jurisprudences réformées à la suite d’un recours, identifier les arrêts de renvois après cassation/annulation, tout cela leur permettra de faire encore la différence. Sans compter l’aspect statistiques / prédiction : probabilité que le licenciement soit reconnu sans cause réelle et sérieuse, indemnisation la plus probable, délai probable de justice…
Pour mémoire, l’arrêté pris en application, publié au JO du 29 avril 21 (on notera le manque d’enthousiasme : ils ont attendu l’extrême limite des trois mois) : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000043426865
Un mot quand même sur le calendrier, fort long puisqu’il s’étend jusqu’à fin 2025! : article 3 :
30 septembre 2021 s’agissant des décisions rendues par la Cour de cassation ;
31 décembre 2024 s’agissant des décisions rendues par les juridictions de premier degré en matière contraventionnelle et délictuelle ;
31 décembre 2025 s’agissant des décisions rendues par les cours d’appel en matière contraventionnelle et délictuelle ;
Cela n’a aucun sens : on demande aux juridictions du premier degré d’être prêtes AVANT les cours d’appel! Alors qu’il est plus intéressant d’avoir les décisions d’appel que les décisions de premier degré, et que l’on peut supposer qu’il est plus simple de doter les cours d’appel de moyens que l’ensemble des juridictions du premier degré, et que pour tous les autres ordres, les décisions d’appel sont publiées avant les décisions de premier degré.
Je me suis demandé également si la publication des arrêts de cassation inclurait les arrêts non publiés ou pas. Et si la communication se ferait à titre rétroactif. On verra.
J’espère enfin que cette communication facilitée ne sera pas prétexte à une anonymisation accrue des décisions et arrêts en matière prud’homale où on chercherait à dissimuler le nom des sociétés, ce qui complexifie grandement la recherche.
Nous avons effectivement vu que le calendrier était paru et c’est une excellente chose ! On peut maintenant réfléchir à l’opportunité d’actions pour accélérer les choses. Merci aussi pour cette question sénatoriale, c’est super de voir les parlementaires se saisir du sujet !
pour ce qui est de vos commentaires sur les délais, plusieurs précisions :
il s’agit de la matière pénale uniquement. Pour le civil le calendrier est le suivant :
30 septembre 2021 s’agissant des décisions rendues par la Cour de cassation ; - 30 avril 2022 s’agissant des décisions rendues par les cours d’appel ; - 30 juin 2023 s’agissant des décisions rendues par les conseils de prud’hommes ;, celles qui vous intéressent le plus je crois
31 décembre 2024 s’agissant des décisions rendues par les tribunaux de commerce ;
30 septembre 2025 s’agissant des décisions rendues par les tribunaux judiciaires.
Je pense que ce qui explique ce calendrier particulier pour le pénal est que les décisions de première instance ne deviennent publiques qu’une fois définitives (si pas d’appel, 10 jours après qu’elles ont été rendues, si appel, après que la décision d’appel a été rendue). En cas d’appel, il y a donc un certain délai qui s’écoulera, ce qui peut expliquer ce choix.
Merci pour les explications sur le pénal! Et effectivement comme vous dites je suis surtout intéressé par les CPH et les chambres sociales des cours d’appel. Il faudra encore prendre son mal en patience pendant quelques années…
L’arrêté du 28 avril 2021 pris en application de l’article 9 du décret n° 2020-797 du 29 juin 2020 relatif à la mise à la disposition du public des décisions des juridictions judiciaires et administratives ne mentionne pas certaines juridictions judiciaires et administratives, notamment :
Juridictions judiciaires :
Tribunaux paritaires des baux ruraux
Conseil de discipline des ordres d’avocats
Décisions du bâtonnier des différents bâtonniers
Chambres de discipline des chambres régionales et de la chambre nationale des huissiers de justice
Chambres de discipline des chambres régionales et de la chambre nationale des commissaires de justice
Chambres de discipline des chambres régionales et de la chambre nationale des commissaires-priseurs judiciaires
Commission nationale d’inscription et de discipline des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires
Conseil des ventes (CVV)
Chambres régionales de discipline des notaires
Juridictions administratives :
Cour nationale du droit d’asile
Cour nationale de la tarification sanitaire et sociale
Tribunaux interrégionaux de la tarification sanitaire et sociale
Haut Conseil du commissariat aux comptes, assisté par le Conseil national de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes
Chambre de discipline de la Compagnie nationale des conseils en propriété industrielle
Conseil national de l’ordre des médecins : Chambre disciplinaire nationale et section des assurances sociales
Chambres disciplinaires de première instance des médecins
Conseil national de l’ordre des chirurgiens-dentistes : Chambre disciplinaire nationale et section des assurances sociales
Chambres disciplinaires de première instance des chirurgiens-dentistes
Conseil national de l’ordre des pharmaciens : Chambre disciplinaire nationale et section des assurances sociales
Chambres de discipline des Conseils régionaux et Conseils centraux des pharmaciens
Conseil national de l’ordre des sages-femmes : Chambre disciplinaire nationale et section des assurances sociales
Chambres disciplinaires de première instance des sages femmes
Conseil national de l’ordre des infirmiers : Chambre disciplinaire nationale et section des assurances sociales
Chambres disciplinaires de première instance des infirmiers
Conseil national de l’ordre des masseurs kinésithérapeutes : Chambre disciplinaire nationale et section des assurances sociales
Chambres disciplinaires de premières instances des Conseils régionaux de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes
Conseil national de l’ordre des pédicures podologues : Chambre disciplinaire nationale et section des assurances sociales
Chambres disciplinaires de première instance de l’Ordre des Pédicures-Podologues
Chambre supérieure de discipline de l’ordre des vétérinaires
Chambres régionales de discipline de l’ordre des vétérinaires
Chambre nationale de discipline des architectes
Chambres régionales de discipline des architectes
Chambre nationale de discipline de l’ordre des experts-comptables
Chambres régionales de discipline de l’ordre des experts-comptables
Conseil supérieur de l’ordre des géomètres-experts
Chambres régionales de discipline de l’ordre des géomètres-experts
Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche
Cour des comptes
Chambres régionales et territoriales des comptes
Cour de discipline budgétaire et financière
Il faudrait demander au Ministère si ces juridictions sont implicitement considérées comme leurs équivalents « généralistes » (tribunal administratif et cour administrative d’appel par exemple dans l’ordre administratif) ou sinon demandez au Ministère de fournir un calendrier pour ces juridictions aussi.
Avec notre association www.cybertron.fr, nous avons commencé à analyser ce nouvel opendata pour créer l’outil www.jurisprudence.ninja
Les développeurs de la Cour de Cassation sont sur GITHUB et ont fait une belle API bien documentée avec un SWAGGER. Cette utilisation de standards de développement libres et ouvert est très encourageante.
Nous attendons maintenant qu’ils remplissent les bases de données. L’ouverture est prévue fin septembre puis progressivement entre 2022 et 2025
Je suis avocat et je peux vous dire que même nous n’avons pas accès aux décisions des chambre de discipline des avocats.
Cette profession vit dans l’omerta absolue et c’est très problématique.
Si je dépose plainte contre un confrère, j’ignore si la plainte est suivie d’effet ou non. C’est le meilleur moyen pour que les confrères du Conseil de l’Ordre se protègent entre eux.
Ce n’est pas pour rien qu’une réforme de la discipline des avocats est engagée par le ministère
Semblent faisables au titre de l’open data des décisions de justice :
Tribunaux paritaires des baux ruraux : l’article L.491-1 du code rural dispose que le tribunal paritaire des baux ruraux fait partie du ressort du tribunal judiciaire => peut-on en déduire l’applicabilité de L.111-13 COJ ?
La Cour nationale du droit d’asile est définie clairement par l’article L.131-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers comme une juridiction administrative, donc soumise à l’article L.10 CJA.
Semblent faisables au titre des documents administratifs :
Tous les ordres : cf décision de communication d’une décision de l’ONPP
Semblent plus compliquées :
Juridictions de la tarification sanitaire et sociale : Les articles L. 113-1 et L. 911-1 à L. 911-3 du code de justice administrative sont applicables par la Cour nationale de la tarification sanitaire et sociale et par les tribunaux interrégionaux de la tarification sanitaire et sociale. (article L.351-7 Code de l’action sociale). Du coup si on spécifie l’application de certains articles on exclut les autres