Un membre posait la question suivante :
Le décret sur les licences mentionne l odbl comme possibilité de licence open data, ce qui rajoute la mention de viralité qui n est pas mentionnée dans la loi.
Quelle est la position de l association, comment est ce que l Ouvre Boite interprete le paradoxe ? Est ce que le décret renchérit la loi ou la loi annule le décret ?
Je donne mon opinion, qui, n’étant pas celui d’un juriste, est sujet à caution.
L’article D323-2-1 du CRPA fait figurer l’ODbL, mais aussi les licences " avec obligation de réciprocité " nommées " Mozilla Public License ", " GNU General Public License " et " CeCILL ", parmi les licences acceptables pour encadrer les réutilisations de documents administratifs. Pourtant, l’article L323-2 dispose que les conditions de réutilisation « ne peuvent apporter de restrictions à la réutilisation que pour des motifs d’intérêt général et de façon proportionnée. Elles ne peuvent avoir pour objet ou pour effet de restreindre la concurrence. »
Je pense que les cas où l’obligation de réciprocité, qui exerce une contrainte très forte, est justifiée par un « motif d’intérêt général » et proportionnée, sont rares et difficiles à défendre. Un juge tenu de trancher un tel litige serait obligé de prendre position dans le débat du logiciel libre contre l’open source. Or son rôle n’est pas de trancher les querelles idéologiques mais de juger selon le droit en vigueur. Le principe de libre réutilisation des données publiques a été plusieurs fois renforcé par le législateur (directive PSI, loi Walter, loi pour une République numérique) tandis que la thèse libriste qui défend que l’obligation de réciprocité est finalement favorable à l’intérêt général ne se retrouve que dans ce décret d’application de la loi pour une République Numérique.
Choisir une telle licence fait courir un risque juridique à l’administration : le choix de la licence est contestable par chacun sur la base de l’article L323-2, et en plus il sera difficile à l’administration d’attaquer un réutilisateur ne respectant pas cette obligation de réciprocité. En réalité, et dans l’attente d’une jurisprudence favorable à la thèse libriste (ce qui me semble improbable), les seuls choix pertinents (hors homologation) pour un code source sont la BSD, les licences Apache, CeCILL-B et MIT. Pour des données ou des autres documents, seule la licence ouverte est possible (hors homologation).
La seule situation qui me vient à l’esprit dans laquelle une administration pourrait utiliser la licence ODbL sans inquiétude, c’est dans le cadre de contributions à un projet ODbL dont la gouvernance dépasse la sphère publique, par exemple OpenStreetMap. En effet, l’article L323-2 ne s’applique pas aux documents sur lesquels des tiers détiennent des droits de propriété intellectuelle.
Pour résumer, je pense que le droit actuel est fondé davantage sur une vision open-source que libriste, et que les licences contaminantes ne sont pas légales pour des documents administratifs.